1954 - Simone de Beauvoir : Les Mandarins

On a toujours embarrassé les écrivains en leur demandant : pourquoi écrivez-vous ? Mais jamais sans doute ne se sont-ils sentis aussi perplexes qu'au lendemain de la dernière guerre. Étonnes par quatre années d'horreur et par les perspectives qui s'ouvraient soudain au monde, ils découvraient que les vieilles valeurs avaient fait long feu et qu'une nouvelle figure de l'homme était en train de naître : quel rôle l'avenir leur réservait-il? les mots pouvaient-ils encore servir? à qui ? pour quoi ? Entre le nihilisme, l'esthétisme, l'action politique, où se situait la littérature? Ce livre n'apporte aucune réponse à ces questions : c'est un roman. Il relate seulement l'histoire de gens qui se les sont posées. On dit volontiers que les écrivains ne sont pas des personnages romanesques : pourtant les aventures de la pensée sont aussi réelles que les autres et elles mettent en jeu l'individu tout entier : pourquoi ne tenterait-on pas de les raconter ? «- Qu'est-ce qui ne va pas ?- Rien, tout va très bien, dis-je d'un ton dégagé.- Allons ! Allons ! je sais ce que ça veut dire quand tu prends ta voix de dame du monde, dit Robert. Je suis sûr qu'en ce moment ça tourne dur dans cette tête. Combien de verres de punch as-tu bus ?- Sûrement moins que vous, et le punch n'y est pour rien.- Ah ! tu avoues ! dit Robert d'un ton triomphant ; il y a quelque chose et le punch n'y est pour rien ; quoi donc ?- C'est Scriassine, dis-je en riant ; il m'a expliqué que les intellectuels français étaient foutus.»

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